mercredi 27 août 2008

Attention, chute de la pierre

TONINO SERAFINI QUOTIDIEN : jeudi 28 août 2008

Chute des ventes dans l’ancien comme dans le neuf, recul sensible des mises en chantier et des dépôts de permis de construire, baisse de l’activité des professionnels du secteur (agences immobilières, promoteurs…). En cette rentrée, la situation de l’immobilier s’annonce encore plus grave que ce qui était prévu avant la trêve estivale. Une série d’indicateurs publiés depuis deux jours témoignent d’une crise profonde, puisque toutes les données font état de baisses à deux chiffres, et qu’une telle accumulation de signaux négatifs n’avait pas été observée depuis plus de dix ans. Toutes les études, qu’elles émanent des ministères ou d’entités privées, vont dans le même sens : l’immobilier dévisse.

«Dégonflement».Ainsi, les services de l’Equipement (rattachés au ministère de l’Ecologie) viennent d’annoncer une chute des ventes de logements neufs de 33,9 % au deuxième trimestre 2008 comparé à la même période en 2007. «La baisse dépasse les 50 % dans cinq régions : Aquitaine, Lorraine, Midi-Pyrénées, Bourgogne, Limousin», observe le ministère. Conséquence : les stocks des logements neufs à vendre enflent et représentent désormais 110 500 unités, «un chiffre qui n’avait jamais été atteint» depuis le début des années 80.

Les promoteurs commencent à lever le pied. Comme Kaufman & Broad, qui a annoncé avant l’été l’abandon de 15 projets immobiliers sur les 115 prévus pour 2008. Du coup, toujours selon le ministère de l’Ecologie, les mises en chantier ont chuté de 11,8 % de mai à juillet comparé à la même période en 2007. Le nombre de permis de construire recule de 16,6 %. «Ce qui est surprenant, c’est la rapidité et la violence du retournement», souligne l’économiste Marc Touati, directeur général délégué de la société d’investissement Global Equities. Lui qui annonçait en 2006 «un dégonflement inévitable de la bulle immobilière avec un réajustement des prix de 15 % sur deux ans» n’écarte pas aujourd’huiune «crise de l’immobilier qui peut devenir un krach». Dans l’immédiat, il estime que le secteur de la construction, qui «a porté la croissance» pendant dix ans, va «contribuer à la récession en cours. Il n’y a plus rien pour tirer la croissance». La crise de l’immobilier risque aussi de plomber davantage le moral des ménages, car la baisse des prix des logements va susciter chez leurs propriétaires «un effet de richesse négatif», estime Touati. Autrement dit, un sentiment d’appauvrissement, puisque demain leur appartement ou leur maison vaudra moins qu’hier.

Au-delà du retournement spectaculaire qui prévaut dans le neuf, des chiffres publiés lundi par la Chambre des notaires de Paris-Ile-de-France montrent que la crise touche aussi l’immobilier ancien, et que la région francilienne n’est pas plus épargnée que le reste de l’Hexagone. Selon les notaires, le «volume» des transactions en Ile-de-France a chuté de 14 % «entre mai 2007 et mai 2008». L’étude précise que «cette tendance à la baisse du nombre de vente concerne tous les départements franciliens». Le recul du volume des transactions est spectaculaire à Paris (- 20 % sur un an), où le prix de la pierre frôle désormais la somme folle de 10 000 euros le mètre carré en moyenne dans certains quartiers (9 800 euros dans le VIe arrondissement). Mais des départements de la petite et de la grande couronne sont aussi touchés par une baisse d’activité : - 17 % de ventes dans les Yvelines, - 16 % dans le Val-d’Oise, - 15 % en Seine-Saint-Denis, - 12 % dans les Hauts-de-Seine.

Dégradé. Tout le secteur de l’habitat ancien est affecté : le fléchissement des ventes touche autant le marché des maisons que celui des appartements. Cette conjoncture très dégradée dont font état les notaires franciliens est grosso modo confirmée au plan national par une étude du SNPI (Syndicat national des professionnels immobiliers) réalisée sur la base d’informations recueillies auprès de 540 agences immobilières. Rappelant un environnement économique difficile - «hausse des produits alimentaires et de l’énergie, confiance des ménages (qui) plonge, banques […] plus restrictives et hausse du crédit immobilier» -, le SNPI fait état d’une baisse du nombre de transactions de - 15 à - 20 % en province comme en région parisienne. Interrogés sur leur perception du marché dans les mois à venir, 62 % des professionnels anticipent une baisse de prix, 30 % une stabilité et seulement 8 % une hausse.

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