samedi 31 mai 2008

Rachida Dati : la disgrâce

"Non madame la ministre, tout le monde suit le texte depuis le début, on ne va pas reprendre dix fois les mêmes explications !", s'est exclamé mardi dernier le président de l'Assemblée nationale, un Bernard Accoyer visiblement excédé, à l'intention de Rachida Dati. On ne sache pas qu'il soit déjà arrivé à un membre du gouvernement de se faire ainsi tancer en pleine séance publique : quel camouflet !

Quelques minutes auparavant, s'agissant d'un amendement prévoyant l'ajout dans la Constitution de la phrase suivante: «La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales», la garde des Sceaux avait déclaré : "La question est débattue par le comité présidé par Simone Veil [qui réfléchit à une modification du préambule de la Constitution, NdA]. Je vous demande de retirer l'amendement sinon le gouvernement est défavorable". Résultat : non seulement l'amendement n'a pas été retiré, mais il a été voté !

Rien ne va plus décidément pour Rachida Dati : "la ministre de la Justice, contrairement à l'usage, n'était pas montée à la tribune de l'Assemblée nationale défendre le projet de loi de révision constitutionnelle, raconte Raphaëlle Bacqué dans Le Monde. "Ne l'envoyez pas au front, elle est nulle", avait imploré Edouard Balladur auprès de l'Elysée. À Matignon, la chose a vite paru entendue. Malgré la présence constante à ses côtés de Roger Karoutchi, le ministre chargé des relations avec le Parlement, qui est là pour la "coacher", Rachida Dati ne peut assumer seule un débat. À deux reprises, lors de réunions avec des parlementaires, François Fillon, agacé, a posé sa main sur le bras de sa ministre pour interrompre le flot de ses affirmations cassantes et démentir ce qu'elle venait d'affirmer."

Rachida Dati, nulle ? Pour les adversaires de sa réforme de la carte judiciaire, a
ucun doute. Ils dénoncent l'autoritarisme et l'absence totale de concertation de la ministre et sa visite d'hier à Agen en donne une nouvelle illustration : "De mémoire de magistrat, on n'a jamais vu ça, écrit La dépêche dans son édition du 30 mai. Pour la venue de leur ministre Rachida Dati, avocats, Les audiences de ce matin ont été déplacées au tribunal d'instance rue Diderot. magistrats du siège ont été priés d'aller voir ailleurs s'ils y sont. (...) Le Syndicat de la magistrature boycotte la réunion d'aujourd'hui, dénonce «une opération de communication», «l'absence totale de concertation», «une politique pénale tournée vers la répression» (...) En face du palais de justice, la CGT appelle à un rassemblement contre la réforme de la carte judiciaire et son refus «de voir supprimer 63 conseils des prud'hommes". Le résultat se trouve dans l'article d'aujourd'hui : "Avec trois quarts d'heure de retard sur l'horaire prévu, c'est sous des sifflets et des huées qu'a été accueillie Rachida Dati au palais de justice d'Agen. Ils étaient entre 150 à 200, moins que les forces de l'ordre, à s'être massés derrière les barrières, dont quelques avocats furieux de s'être vu interdire l'accès à ce qu'ils considèrent comme «leur lieu de travail». «Il y a un précédent historique, c'est Marie-Antoinette, qui avait peur du peuple», s'est écrié Me Alain Miranda. Même disposition d'esprit de la part de la jeune garde représentée par Me Laurent Bruneau : «Tous les gardes des Sceaux qui sont venus ici ont reçu les avocats. C'est du mépris de sa part. La justice sans avocat, ça ne marche pas. Son attitude est intolérable". Pour mémoire, une des perles de la réforme de la carte judiciaire : après avoir, depuis des semaines, garanti que le tribunal des Sables d'Olonnes passerait au travers du kärcher rachidesque, voilà que tout à coup est annoncée la programmation de sa suppression. Le député-maire de la ville, Louis Guédon, UMP s'il-vous-plaît, s'insurge et présente un argument décisif : "une absurdité, quand on sait que le tribunal est flambant neuf puisqu'on vient d'y effectuer pour 6 millions d'euros de travaux !"

Aucun commentaire: